"Salon noir", exposition personnelle, Silicone espace d'art contemporain, Bordeaux

Textes de Chloé Bonnie More


Hier, la tourmente


La tourmente des uns fait le rationalisme des autres.

Témoignage de la trace et exploration des temps.

Qu’est ce que cela signifie de représenter le contour animale lorsque l’on peut le reproduire
Ancrer dans l’histoire une trace qui témoigne de la forme
Tracer le discours à travers une certaine brutalité sensorielle

Lorsque nous nous retrouvons ici bas
Sanctifiés et tétanisés, nous pensons pourtant inévitablement à retourner sur nos pas.
La quête dépasse l’entendement et le témoignage se veut poignant
Qu’en était-il des formes lorsque nul ne savait quelle était son époque
Rétrospection impossible, structuration désirable.

Jamais nul ne fût plus envié que depuis ses plus jeunes années
Quel regard jette-t-on à la tourmente
Si elle est intérieure, la tétanie empêche le discours formel
Si elle nous est étrangère, l’inquiétude l’emporte sur nos certitudes passées
Les sens amplifiés dans l’obscurité opèrent sur un rationalisme sacré.

Échos d’enfers, nul ne peut s’en défaire.

Traversés comme par la lave d’un Etna énervé, nous voici pétrifiés à l’idée de fusionner
Brisés par milliers, le corps ne peut lutter contre nos pensées les plus tourmentées
Volontaires, les mains se crispent et s’alourdissent
Rien ne peut plus nous apaiser.

Échos d’enfers, les vents ne peuvent se taire.

Claquements de portes, bruissements d’éclairs
Les animaux ont le flair des choses dont tout homme aura un jour souffert
Inquiétante atmosphère que celle d’une nature livrée à elle même
Nul ne saurait se délivrer d’une telle fête amère
Pourtant volontaires, nous sommes les tributaires des choses éphémères
Nul n’oublie la distinction du bruit, nul ne prévient l’écho des siens
Profondément atteint, il se peut que chacun se souvienne de souvenirs lointains
Ancrés pour certains, il est des traumatismes que nul ne soutient.

Véritable épopée, l’orage est passé.
Ce soir encore, la nuit tombera sur nos rêves les plus étrangers.
Ce soir, la nuit.

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L'obscurité est un leurre

Lorsque Baco fait une sortie de route, c’est souvent qu’il y a un animal sur son chemin. Cette fois, il l’agrippe, il lui a sauté dessus, pourtant il ne le renversera pas. Instantanément il l’embrasse à plein corps. Étreinte puissante, c’est la violence les lie. Aveuglée, totalement effrayée, la bête hystérique laisse les traces de sa lutte. Brutalisée, elle a été pourchassée et traquée mais jamais abattue. Ces brutes, ces barbares, ont abîmé la bête, ils ont percé cette chair qui se vend si cher et pour laquelle ils se retrouvent dans ce cirque bestiaire. Ses bruits quand elle gémit, sont nouveaux pour ceux qui ont pu l’observer dans le passé. La furie rend le hurlement sourd alors que tous l’imaginaient strident.

Danser
Lorsque Ari apparaît, la douceur de ses traits ne se laissent pas troubler par la scène des miraculés. Les montagnes nous protègent, pense t-elle. Oui, Ari est ce qui permet au mythe et à la forme de danser ensemble. Témoin insatiable elle rappelle les minuties que Baco ne perçoit pas.

Survivre
Dans ses futures cicatrices, nul ne sait si la bête pourra réellement résister à sa chaire maculée.
La bête se meurt. Les poils s’offrent et s’accrochent à Baco,. Ils sont ce qui lui reste de plus vivant.
Éreintée, il faut la sacrifier.

Sacrifice
Dans ses bras la violence perd tout son sens. Les pattes autour de la nuque de Baco, la bête pleure. Les mains autour de son cou, Baco la libère. Elles serrent alors le peu qu’il reste de cette chaire. Les veines apparaissent peu à peu, la danse a commencée, le duo est formé, rien ne peut plus les arrêter.

L’équilibre
Ari comprend. Dans le salon noir, les enfants pénètrent de leurs yeux endormis qui ne questionnent rien mais rendent la scène bien réelle. Jusqu’alors trop plongés dans l’obscurité, la communauté leur a permis d’éclairer un pan de cette terrifiante cette interruption effrénée.

L’oeil
Abimée, la bête les a surpris de sa candeur abattue. L’odeur de la peur, ils s’en souviennent encore. Les poils sont restés entre ses doigts. La tête est devenue sacrée, ce n’était que le début d’une longue épopée. Rencontre au sommet, vous voici observant les feux ardents que la bête a un jour offert sans aucun repère.

L’effroi
Transparent, il coule le long de la matière et se fige là où Baco et Ari opèrent. Techniquement saisit, la vision ne nous échappe pas. Seule la bête a été sacrifiée, le reste sanctifié. Économie triviale, lorsque le geste est offert, il vide sans effort nécessaire.

Pas besoin de se laisser faire, la seule âme qui sert est celle qui nous éclaire.
L’obscurité est un leurre, dont seule la danse peut se défaire. Valse d’un autre temps, binaire, elle prolifère. Nécessité d’achever, Baco et Ari sont ici réunis et font office de lumière.

La bête est restée, seule la chaire a été transformée